D’où vient cette Parole de Vie ? D’un livre de l’Ancien Testament écrit par Ben Sira, un sage, un scribe de Jérusalem. Il enseigne un thème cher à toute la tradition de la sagesse biblique : Dieu est miséricordieux envers les pécheurs et nous devons l’imiter. « Miséricordieux et bienveillant, lent à la colère et plein de fidélité » , le Seigneur pardonne toutes nos fautes. Il « détourne les yeux des péchés des hommes pour les amener au repentir ». Il « jette derrière nous tous nos péchés ». Comme tout père ou toute mère, il « multiplie le pardon », car il aime ses enfants, leur fait confiance et les encourage sans jamais se lasser.
Mais étant père et mère, Dieu ne se contente pas d’aimer et de pardonner à ses enfants. Son grand désir est de les voir se traiter en frères et sœurs, s’entendre et s’aimer. Le grand projet de Dieu sur l’humanité ? Une fraternité universelle, plus forte que les divisions, tensions et rancœurs qui s’insinuent si facilement après les incompréhensions et les fautes.
Pourquoi les familles se défont-elles ? Parce que nous ne savons pas nous pardonner. De vieilles haines entretiennent les divisions entre les membres d’une même famille, les groupes sociaux et les peuples. Certains même enseignent à ne pas oublier les torts subis, à nourrir des sentiments de vengeance… Une rancœur sourde empoisonne l’âme et corrompt le cœur.
Le pardon serait-il un signe de faiblesse comme certains le pensent ? Bien au contraire. C’est l’expression d’un grand courage, d’un amour vrai, d’autant plus authentique qu’il est plus désintéressé. « Si vous aimez ceux qui vous aiment », dit Jésus, « quelle récompense allez-vous en avoir ? » Tout le monde en fait autant. « Vous, aimez vos ennemis » .
Demandons donc à Jésus un amour de père, de mère, un amour de miséricorde envers nos prochains, surtout envers ceux qui sont dans l’erreur. Et à ceux qui sont appelés à vivre une spiritualité de communion, comme l’est la spiritualité chrétienne, l’Évangile demande encore plus : « Pardonnez-vous mutuellement ». L’amour réciproque exige presque un pacte entre nous : celui d’être toujours prêts à nous pardonner. C’est la seule manière de contribuer à créer la fraternité universelle.
« Pardonne à ton prochain l’injustice commise ; alors, quand tu prieras, tes péchés seront remis »
Ces paroles non seulement nous invitent à pardonner mais elles nous rappellent que, pour être nous-mêmes pardonnés, il nous faut pardonner. Dieu nous écoute et nous pardonne dans la mesure où nous savons pardonner. Jésus lui-même nous met en garde : « C’est la mesure dont vous vous servez qui servira de mesure pour vous » . « Heureux les miséricordieux, il leur sera fait miséricorde ». Car un cœur endurci par la haine n’est même plus capable de reconnaître et d’accueillir l’amour miséricordieux de Dieu.
Comment vivre alors cette Parole de Vie ? D’abord en pardonnant tout de suite à ceux avec qui nous ne sommes pas encore réconciliés. Mais cela ne suffit pas. Nous avons encore à éliminer de notre cœur la simple indifférence, le manque de bienveillance, la moindre attitude de supériorité ou de négligence envers tous ceux que nous côtoyons.
Bien plus encore, il nous faut faire preuve de prévention. Chaque matin regarder les autres d’un œil nouveau, en famille, à l’école, au travail, prêts à ne pas juger, à faire confiance, à espérer, à croire sans cesse. Approcher les autres avec cette amnistie complète dans le cœur, avec ce pardon universel. Ne pas se souvenir de leurs défauts, tout couvrir avec l’amour. Au cours de la journée, essayer de réparer les impolitesses et les mouvements d’humeur en présentant des excuses ou en faisant un geste d’amitié. Remplacer le rejet instinctif de l’autre par une attitude de plein accueil, de miséricorde sans limites, de pardon complet, de partage et d’attention aux besoins des autres.
Alors quand nous prierons le Père et surtout en lui demandant son pardon, nous verrons notre demande exaucée. Car nous pourrons dire avec confiance : « Pardonne-nous nos torts envers toi, comme nous-mêmes nous avons pardonné à ceux qui avaient des torts envers nous. »
Chiara LUBICH
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