L’antenne de Pedrinhas (SP, Brésil) de la Fazenda da Esperançaaccueille des jeunes et des adultes qui sont à différents stades de rétablissement de la toxicomanie et de différentes formes de dépendance et de malaise social. Il n’y avait pas de meilleur lieu pour accueillir la rencontre d’UNIRedes, la plateforme d’ONG, de projets sociaux, humanitaires et d’agences culturelles qui s’inspirent de la spiritualité de l’unité de Chiara Lubich en Amérique latine. 140 personnes représentant 37 des 74 organisations partenaires d’UNIRedes, actives dans 12 pays d’Amérique latine et des Caraïbes, étaient présentes.
L’objectif de la rencontre était de présenter le travail de ces années à Margaret Karram et Jesús Morán, présents à la rencontre ; de définir les prochaines étapes communes à toutes les organisations partenaires et de renforcer le lien avec le Mouvement des Focolari, afin de partager l’expérience acquise, y compris au-delà du continent latino-américain.
UNIRedes : un réseau de réseaux
Maria Celeste Mancuso, d’Argentine, coresponsable internationale du Mouvement Humanité Nouvelle, explique qu’UNIRedes n’est pas seulement un super projet de solidarité : « C’est aussi un espace qui génère une réflexion culturelle visant à identifier les catégories anthropologiques et épistémologiques nécessaires pour générer une nouvelle culture de l’attention à la personne et aux sociétés latino-américaines. » C’est pour cette raison que les agences culturelles inspirées par le charisme de l’unité, telles que l’Institut Universitaire Sophia (Loppiano, Italie), sa branche locale, Sophia Amérique Latine et Caraïbes (ALC), et le Centre Universitaire ASCES UNITA de Caruaru (PE), en font partie intégrante.
Virginia Osorio, Uruguayenne, l’une des initiatrices du projet, en explique les origines : Les changements politiques et économiques constants dans nos pays rendaient nos organisations de plus en plus fragiles et isolées. Avec UNIRedes, nous avons trouvé un lieu où nous renforcer mutuellement et partager nos souffrances et nos espoirs. Notre dernier projet concernait le Genfest : des centaines de jeunes ont fait du volontariat auprès de plusieurs de nos organisations, faisant ainsi une expérience directe de fraternité et de proximité avec les plus démunis.
La racine commune : « Donner la vie pour son peuple »
La première racine d’UNIRedes ne repose pas sur des analyses géopolitiques ou économiques : il faut remonter au début des années soixante-dix, lorsque les Gen, les jeunes des Focolari, comme beaucoup des jeunes de leur âge de nombreux pays, voulaient changer le monde et instaurer l’égalité, la justice, la dignité.
Chiara Lubich, qui les rencontrait fréquemment, avait soutenu et confirmé la nécessité d’une révolution sociale pacifique, en particulier en Amérique latine, continent qu’elle considérait comme ayant cette vocation particulière. Elle disait aux jeunes des Focolari que « chacun doit sentir que nous devons donner notre vie pour l’humanité, mais il faut que nous trouvions notre Jésus abandonné local, afin de donner la vie pour notre peuple[1] ».
« C’est ainsi que beaucoup se sont rendus à la périphérie des villes, dans les favelas, partout où la pauvreté privait les personnes de leur dignité », explique Gilvan David, un Brésilien du groupe latino-américain de coordination de UNIRedes. « Les premières ONG sont nées et, entre-temps, nous tentions de nous structurer, mais ce n’était pas suffisant : “Vous venez à nous – nous disaient les [plus] pauvres -, mais ensuite vous partez et vous nous laissez seuls.” Pour répondre à ce cri, nous avons commencé à travailler en réseau avec les politiques publiques locales et, à la même période, plusieurs prêtres qui vivaient la spiritualité de l’unité ont fondé des projets sociaux : Frei Hans avec la Fazenda da Esperança, le père Renato Chiera avec la Casa do Menor et d’autres. »
Une “unique” Amérique Latine
Puis les premiers groupes d’organisations ont vu le jour – poursuit Gilvan David –, ‘Sumá Fraternidad’ qui regroupait les projets de quelques pays hispanophones ; l’association civile ‘Promocion Integral de la Persona’ (PIP) au Mexique et les organisations sociales brésiliennes continuaient à se développer, trouvant leur propre identité et leur espace de service. Ces années n’ont pas été faciles, mais nous avons commencé plusieurs parcours dans différents territoires d’Amérique latine pour soutenir leur engagement social, qui ont ensuite fusionné avec UNIRedes. Nous nous sommes réunis à plusieurs reprises, mais la rencontre fondatrice a eu lieu en 2014, en présence de Maria Voce (Emmaüs) et de Giancarlo Faletti, alors respectivement Présidente et Coprésident du Mouvement des Focolari. Emmaüs avait dit à cette occasion : “Vous donnez au Mouvement une nouvelle visibilité, un nouveau sens à son action, vous êtes un témoignage pour ceux qui vous regardent de l’extérieur ; vous donnez une visibilité complète au charisme par le biais d’actions concrètes.” Je dirais que c’est à ce moment-là que nous nous sommes reconnus comme une réalité unique pour toute l’Amérique Latine : nous nous sommes retrouvés enveloppés par le “charisme de l’unité”.
Les contributions qui ont construit cette rencontre ont été nombreuses et substantielles, avec la présentation des différentes organisations partenaires.
Juan Esteban Belderrain : de l’inégalité à l’espérance
Le politologue argentin Juan Esteban Balderrain a analysé le plaie de l’inégalité, dont l’Amérique latine détient le record mondial. « Il s’agit de construire une vision de ce continent qui parte de l’espoir et c’est possible parce que si nous regardons la racine la plus profonde du problème des inégalités, nous trouvons la perte de référence au Dieu qui est amour et qui nous aide à comprendre que nous sommes frères et sœurs les uns des autres et de la nature, qui est aussi l’expression de son amour. Se référant au XXe siècle, Paul VI a dit que c’était un temps béni parce qu’il exigeait de tous la sainteté. Je pense que ces mots s’appliquent également au nôtre. »
Père Vilson Groh : La « mystique des yeux ouverts »
Depuis plus de 40 ans, le père Vilson vit dans le “morro”, une favela de Florianopolis (Santa Catarina, Brésil), où il mène des projets sociaux, en particulier pour les jeunes. Il a parlé de la « mystique des yeux ouverts » : « Nous devons porter nos organisations dans les caves sombres de nos périphéries, y être un espoir. Le Genfest a apporté la perspective de “l’ensemble”, que le pape François promeut. Cela requiert un cheminement patient et résilient ; cela demande d’être déterminés dans la poursuite du bien commun. L’unité est supérieure au conflit, dit toujours le Pape, et l’unité, est pluralité. Introduisons la diversité dans nos organisations : le charisme de l’unité est une porte par laquelle le Christ blessé ouvre des espaces. »
Vera Araujo : L’Amérique Latine constructrice de fraternité
L’intervention de la sociologue brésilienne s’est concentrée sur une vision positive qui sait reconnaître le patrimoine culturel et humain latino-américain et qui l’offre au monde comme un don.
« UNIRedes trouve son origine dans le charisme de Chiara Lubich et peut devenir une chance inouïe pour le reste du monde : l’unité vue non seulement comme une valeur religieuse, mais aussi comme une force capable de former efficacement la famille humaine, en réalisant une interaction entre la multiplicité des personnes, tout en préservant les distinctions dans le contexte des réalités sociales. Ici, le charisme de l’unité offre une solution qui n’est pas facile, mais un sens, une signification, une Personne : le Christ abandonné sur la croix.
« Pour bien aimer – dit Chiara -, ne pas considérer seulement les difficultés, les erreurs et les souffrances du monde comme des maux sociaux auxquels (il faut) porter remède, mais y découvrir le visage du Christ qui ne dédaigne pas de se cacher derrière toute misère humaine [2].»
Susana Nuin Núñez : la marche des peuples et des mouvements sociaux
La sociologue uruguayenne a décrit le parcours et la richesse sociale, politique, économique des peuples du continent et de quelques mouvements sociaux. « Ces réseaux aux physionomies les plus variées, avec leurs développements dans les pratiques sociales ou dans le monde académique, agissent de manière complémentaire, générant un tissu socioculturel indiscutable au caractère communautaire multiforme dont l’Amérique latine est porteuse. » Elle a souligné ensuite la particularité d’UNIRedes qui, depuis plus de dix ans, est un sujet social qui guérit, révolutionne, transforme et agit à partir de l’Évangile et de la Parole de l’unité.
Margaret Karram et Jesús Morán : UNIRedes fait partie du Mouvement des Focolari
« Ceux qui veulent vivre l’Evangile dans cette région sont toujours en crise parce qu’ils voient constamment des inégalités » – a souligné Jesús. « L’unité ne peut laisser de côté cette réalité. Comment pouvons-nous construire l’unité sur ce continent, sans prendre en compte ceux qui sont rejetés par la société ? Ce que vous faites en tant qu’UNIRedes doit inspirer l’ensemble du Mouvement dans cette région. Son travail pour l’unité n’est pas crédible s’il ne passe pas aussi par les œuvres sociales. Bien sûr, ce n’est pas nous qui résoudrons les problèmes sociaux. La seule chose que nous pouvons faire, c’est faire en sorte que les personnes se convertissent à l’amour. Si nous touchons les cœurs, quelqu’un saisira l’esprit et, dans la liberté, comprendra comment vivre l’Évangile. »
Margaret a encouragé UNIRedes à aller de l’avant : « Maintenant, vous devez comprendre comment faire arriver à tous dans le monde votre vie et votre exemple. ». Citant une intervention de Chiara Lubich datant de 1956, elle a rappelé que, dans son engagement social, le Mouvement ne doit pas oublier que la clé de la résolution des problèmes qu’offre le charisme de l’unité réside dans la nouveauté de la réciprocité plus que dans la justice. Il promeut le partage, la mise en commun entre tous du peu ou de la richesse dont on dispose pour créer un plus grand Bien Commun qui, en plus de résoudre les problèmes sociaux, produit l’épanouissement humain et spirituel qui ne se produit que dans la communion entre tous. Enfin, Margaret la lancé une proposition : « Ajouter un nouvel article à votre Charte des principes et des engagements : un pacte solennel de fraternité à proposer à ceux qui veulent faire partie d’UNIRedes : nous sommes ici pour témoigner de l’amour réciproque et c’est seulement si nous avons cet amour que le monde croira. »
« UNIRedes nous parle d’espérance », a conclu M. Celeste Mancuso. « Il s’agit d’une proposition transversale et synodale de réseau organisationnel, qui peut inspirer des modèles semblables pour les périphéries existentielles d’autres parties de notre vaste monde. De cette manière, nous pourrons penser à construire des réseaux mondiaux de fraternité qui promeuvent le bien commun. »
Stefania Tanesini
[1] Chiara Lubich aux jeunes des Focolari, Rocca di Papa (Rome, Italie), 15 mai 1977.
[2] Chiara Lubich, “Pour une civilisation de l’unité”. Discours prophétique au Congrès “Une culture de paix pour l’unité des peuples”. Castelgandolfo, (Rome) 11-12 juin 1988.
À ce carrefour de pays, où les fleuves d’Iguaçu et Parana se rencontrent, se trouve la frontière la plus fréquentée d’Amérique latine ; la zone est caractérisée par une grande diversité culturelle et la présence séculaire de peuples indigènes, tels que le grand peuple Guaraní. Le tourisme est la principale ressource économique de cette région où les personnes viennent principalement pour visiter les chutes d’Iguaçu, qui sont les plus grandes au monde, avec une largeur de 7,65 km, et sont considérées comme l’une des sept merveilles naturelles de la planète.
Dans son message de bienvenue, Tamara Cardoso André, présidente du Centre des droits de l’homme et de la Mémoire Populaire de Foz do Iguaçu (CDHMP-FI), explique qu’en ce lieu, ils veulent donner un sens différent aux frontières nationales : « Nous voulons que notre triple frontière devienne toujours plus un lieu d’intégration, une terre que tous sentent leur, comme l’entendent les peuples autochtones qui ne connaissent pas de frontières. »
Foz do Iguaçu, dernière étape
C’est ici que s’achève le voyage au Brésil de Margaret Karram et Jesús Morán, président et co-président du mouvement des Focolari. Ils l’ont parcouru du nord au sud : depuis l’Amazonie brésilienne, en passant par Fortaleza, Aparecida, la Mariapolis Ginetta à Vargem Grande Paulista, la Fazenda da Esperança à Pedrinhas et Guaratinguetà (SP), jusqu’à Foz do Iguaçu. Ici, la famille “élargie” de la communauté tri-nationale des Focolari célèbre sa jeune histoire et raconte la contribution d’unité qu’elle apporte à ce lieu : l’étreinte de trois peuples que la spiritualité de l’unité rassemble en un seul, transcendant les frontières nationales, tout en conservant chacun sa propre identité culturelle distincte. Sont également présents pour l’occasion le card. Adalberto Martinez, archevêque d’Asuncion (Paraguay), l’évêque du lieu, Mgr Sérgio de Deus Borges, Mgr Mario Spaki, évêque de Paranavaí et Mgr Anuar Battisti, évêque émérite de Maringá. Un groupe de la communauté musulmane de Foz, avec laquelle des relations d’amitié fraternelle existent depuis longtemps, est également présent.
Des peuples aux racines communes
Arami Ojeda Aveiro, étudiante en médiation culturelle à l’Université Fédérale d’Intégration Latino-Américaine (UNILA), illustre le cheminement historique de ces peuples et les graves blessures qui se sont accumulées au long des siècles. Le conflit entre le Paraguay, d’une part, et l’Argentine, le Brésil et l’Uruguay, d’autre part (1864-1870), a été l’un des plus sanglants d’Amérique du Sud en termes de vies humaines, avec des conséquences sociales et politiques pour l’ensemble de la région. D’autre part, il existe également de nombreux facteurs culturels communs, tels que la musique, la gastronomie, les traditions populaires issues des mêmes racines culturelles indigènes, comme la Yerba Mate Guaranì, une boisson typique des trois peuples.
La culture Guaraní est l’une des plus riches et des plus représentatives d’Amérique du Sud ; elle est le témoignage vivant de la résilience et de la capacité d’adaptation d’un peuple qui a su préserver son identité au fil des siècles avec une cosmogonie unique, où le lien avec la nature et le respect des traditions sont fondamentaux et peuvent constituer une grande richesse pour toute l’humanité.
« Ainsi – conclut Arami Ojeda Aveiro -, la région de la triple frontière ne constitue pas seulement une frontière géographique, mais un espace multiculturel et de coopération qui renforce l’ensemble de la région.
La communauté “tri-nationale” des Focolari
De toutes les communautés des Focolari dans le monde, celle-ci présente un caractère unique : « Il nous serait impossible de nous sentir une seule famille si nous ne regardions que nos histoires nationales », explique une jeune femme d’Argentine. Monica, du Paraguay, l’une des pionnières de la communauté avec Fatima Langbeck, du Brésil, nous raconte que tout a commencé par sa prière quotidienne : « Seigneur, ouvre-nous la voie pour que nous puissions établir une présence plus solide du Focolare et que ton charisme d’unité puisse fleurir parmi nous. Depuis 2013, nous formons une unique communauté et nous voulons écrire pour cette terre une autre histoire, qui témoigne que la fraternité est plus forte que les préjugés et les blessures séculaires. La parole de l’unité de Chiara Lubich nous unit, lorsqu’elle dit que la véritable socialité dépasse l’intégration, parce qu’elle est l’amour réciproque en action, tel qu’il est annoncé dans l’Évangile. Nos particularités et nos différences nous rendent plus attentifs les uns aux autres, et les blessures de nos histoires nationales nous ont appris à nous pardonner mutuellement. »
Les contributions artistiques témoignent de la vitalité et de l’actualité des racines culturelles des peuples qui habitent cette région. Il y a les chants de la communauté argentine arrivée du “littoral“, de la côte ; puis “El Sapukai”, la danse paraguayenne très rythmée qui se danse avec (jusqu’à) trois bouteilles sur la tête ; la représentation du peuple Guaraní entonne un chant dans sa langue à la louange de la “grande mère”, la forêt, qui doit être protégée, qui produit de bons fruits et donne vie à toutes les créatures.
Le père Valdir Antônio Riboldi, prêtre du diocèse de Foz, qui a connu les Focolari en 1976, poursuit le récit en écrivant : « Les Focolari de Curitiba au Brésil et d’Asuncion au Paraguay ont commencé à promouvoir des événements qui réunissaient des personnes des trois pays voisins, une expérience que nous avons appelée ”Focolare tri-national”. Ici aussi, la vie ecclésiale évolue dans le sens de la communion, en promouvant des initiatives conjointes entre les différents diocèses. »
Il est clair que la vie de cette région et de la communauté locale des Focolari ne s’adresse pas seulement à l’Amérique latine, mais au monde entier. Elle dit qu’il est possible de marcher ensemble, tout en étant différents : c’est la spiritualité de l’unité qui entre en contact avec la partie la plus profonde de l’identité des personnes et des peuples, faisant fleurir l’humanité et la fraternité communes.
La parole à Margaret Karram et Jesús Morán
« Je me suis sentie accueillie non pas par un, mais par trois peuples, a déclaré Margaret Karram. Toute ma vie, j’ai rêvé de vivre dans un monde sans frontières. Ici, j’ai eu l’impression que mon souhait le plus profond avait été exaucé, pour cette raison, je sens que je fais partie de vous. Vous êtes la confirmation que seul l’amour fait tomber tous les obstacles et abolit les frontières. »
« J’ai vécu 27 ans en Amérique latine – a dit pour sa part Jesús Morán -, mais je n’étais jamais venu dans cette région. Vous avez connu beaucoup de souffrance : le peuple guarani a été dépossédé de ses terres et dispersé. Ce que vous faites aujourd’hui est important, même si c’est modeste : Nous ne pouvons pas réécrire l’histoire, mais nous pouvons aller de l’avant et guérir les blessures, en faisant nôtre le cri de Jésus abandonné. Les blessures se guérissent en créant des relations interrégionales, aussi avec les peuples d’origine, parce qu’ils sont en fait les seuls à être véritablement “tri-nationaux”. Eux aussi ont reçu la lumière du Christ ; n’oublions pas le travail d’évangélisation et de promotion humaine que les Jésuites ont accompli dans cette région avec “las Reduciones” entre les années 1600 et 1700. Aujourd’hui, nous sommes liés à cette histoire, à tout ce que fait l’Église, et nous savons que l’unité est la réponse dans ce monde qui a besoin d’une âme et de bras pour réaliser une véritable mondialisation à la hauteur de la dignité de l’homme. »
À la fin, reprenant la parole, Margaret a partagé ce qu’elle avait vécu au cours de ce mois : « Ce voyage a fait grandir en moi la foi, l’espérance et la charité. En Amazonie, aux confins du monde, la “foi” a émergé, puissante : j’ai rencontré des personnes qui croient fermement que tout est possible, même les choses les plus difficiles. Ils rêvent et ils réalisent ! Je voudrais avoir ne serait-ce qu’une graine de leur foi, comme le dit l’Évangile : “Si vous avez de la foi gros comme une graine de moutarde, vous direz à cette montagne : ‘Passe d’ici jusque là-bas’, et elle y passera ; rien ne vous sera impossible” (Mt 17, 20). De là, je retiens cette foi qui déplace les montagnes et le courage de rêver de grandes choses. Ensuite, le message du Genfest ne peut être qu’”espérance” : nous avons vécu cette expérience ensemble : tout le Mouvement était engagé avec les jeunes et pour les jeunes. Cela a été aussi un événement œcuménique et interreligieux qui a donné beaucoup d’espérance.
Et enfin, la “charité”, qu’aujourd’hui j’ai vue ici parmi vous et que nous avons touchée du doigt dans les nombreuses organisations sociales avec lesquelles nous sommes entrés en contact ce mois-ci : la Fazenda da Esperança, les nombreux mouvements et nouvelles communautés ecclésiales que nous avons rencontrées à Fortaleza ; la rencontre de UniRedes, qui réunit toutes les organisations sociales et les agences culturelles d’Amérique latine qui s’inspirent du charisme de l’unité [dont nous parlerons séparément]. Tout cela dit “charité”, car chaque réalité sociale naît de l’amour du prochain, de la volonté de donner sa vie pour son peuple.
De cette frontière part une espérance pour toutes les communautés des Focolari dans le monde et au-delà. En décembre dernier, j’avais suggéré le projet “Méditerranée de la fraternité”, où seraient rassemblées toutes les actions déjà en cours et celles qui verront le jour, pour construire la paix dans cette région très éprouvée par la guerre. Un projet de “fraternité pour l’Amérique latine” pourrait aussi partir d’ici et s’étendre à tous les pays qui la composent, nous le confions à Marie. »
Le changement fait toujours peur, surtout lorsque nos expériences ont été fortes et gratifiantes. Nous en faisons l’expérience à tous les stades de la vie, dans nos études et notre travail, dans toutes les réalités politiques, sociales et associatives, en particulier lorsque nous vivons des rôles de responsabilité que nous ne voulons pas perdre.
Nous aimerions que certaines expériences ne se terminent jamais. Mais c’est une illusion. Rester dans des “expériences vraies et belles” ne nous fait pas vivre la vie, car la vie elle-même est changement, et c’est cette dynamique qui la rend fascinante, même lorsqu’elle est douloureuse.
C’est ce qu’a bien expliqué Cicely Saunders, fondatrice du premier hospice moderne, une femme extraordinaire qui, en tant qu’infirmière, assistante sociale et médecin, a “inventé” une nouvelle façon de s’occuper des personnes dans les moments les plus difficiles. Selon elle, le temps des expériences authentiques est un temps de profondeur plutôt que de durée. “Les heures des vraies relations semblent passer en un instant, alors que les jours ennuyeux ne semblent jamais se terminer. Mais des années plus tard, les heures authentiques restent gravées pour toujours, les journées superficielles s’effacent complètement.”1
Ces moments authentiques – même s’ils sont vécus dans la douleur et l’obscurité – peuvent se transformer, peut-être avec émerveillement et émotion, en occasions de profonde paix et de lumière. Ces passages, surtout lorsqu’ils sont accompagnés d’une relation authentique avec les autres, peuvent nous aider et nous donner la force d’affronter les difficultés, les épreuves, les souffrances et les fatigues que nous rencontrons sur notre chemin. Ils nous encouragent à repartir sans peur, en affrontant avec audace ce qui nous attend, en allant à la rencontre de l’autre et en accueillant les douleurs de l’humanité qui nous entoure, pour nous engager à notre tour avec le désir d’apporter là où elles manquent la lumière et la paix que nous avons nous-mêmes expérimentées.
Dietrich Bonhoeffer a dit : “Le temps perdu semble correspondre à un temps non vécu dans lequel nous n’aurions pas aimé”. (2)
Que se passe-t-il lorsque ces expériences authentiques semblent disparaître et ne sont plus là ? Cela enlève-t-il toute valeur à l’expérience et à ses racines ? Absolument pas ! La valeur de la mémoire est le fondement même du progrès humain. D’ailleurs, comme le dit le philosophe George Santayana, “celui qui ne se souvient pas du passé est condamné à le répéter”.
Ceux qui nous ont précédés ont sacrifié leur vie pour notre liberté et notre bonheur. Il faut savoir revenir aux expériences qui ont fondé notre vie personnelle et celle de nos communautés pour avoir la force de toujours recommencer, même dans les moments de doute, de fragilité ou de fatigue.
Cicely Saunders. Prix Templeton 1981
Dietrich Bonhoeffer. Lettres de “résistance et de reddition” et autres écrits de prison
Photo de Sasin Tipchai – Pixabay
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L’IDEA DEL MESE è attualmente prodotta dal “Centro del Dialogo con persone di convinzioni non religiose” del Movimento dei Focolari. Si tratta di un’iniziativa nata nel 2014 in Uruguay per condividere con gli amici non credenti i valori della Parola di Vita, cioè la frase della Scrittura che i membri del Movimento si impegnano a mettere in atto nella vita quotidiana. Attualmente L’IDEA DEL MESE viene tradotta in 12 lingue e distribuita in più di 25 paesi, con adattamenti del testo alle diverse sensibilità culturali. www. dialogue4unity.dev.focolare.org1
Start Here and Now » est le dernier single du groupe international Gen Verde. Il s’agit d’un hymne à l’unité, à la force, au courage et à la joie qui met en scène deux groupes musicaux de jeunes : Banda Unità (Brésil) et AsOne (Italie). Nous sommes tous invités, avec notre diversité, à dépasser les frontières pour construire un monde où l’attention, l’amour, la justice et l’inclusion sont la réponse à la douleur, à l’horreur des guerres et des divisions », explique le groupe.
Qu’est-ce qui se cache derrière cette chanson ?
La nouvelle chanson est en elle-même une expérience « au-delà des frontières » en raison de la manière dont elle a été produite », poursuit le groupe. Les voix ont été enregistrées dans trois parties différentes du monde et la vidéo a également été tournée dans trois endroits différents : Loppiano et Vérone (Italie) et Recife (Brésil).
Le projet prévoit la participation de deux groupes musicaux de jeunes qui partagent les valeurs du Gen Verde. Banda Unità est un groupe musical brésilien et AsOne est un groupe de Vérone, en Italie. Ces groupes souhaitent également partager à travers la musique, les valeurs de paix, de dialogue et de fraternité universelle.
Ce single se distingue par son rythme très entraînant et ses paroles puissantes, chantées dans différentes langues, pour faire ressortir le processus créatif inspiré par l’interculturalité et l’engagement en faveur de la fraternité universelle qui est mise en lumière lors de l’événement international Genfest », poursuit Gen Verde.
Gen Verde a interprété cette chanson pour la première fois à Aparecida, au Brésil, avec les groupes musicaux Banda Unità et AsOne, le 20 juillet 2024, lors du Genfest, l’événement mondial de la jeunesse du mouvement des Focolari. Cette édition était intitulée « Juntos para Cuidar – Together to Care ».
Harcèlement À l’école, pendant la pause, je me lavais les mains dans les toilettes lorsque cinq ou six filles et deux garçons m’ont attaqué, me tirant les cheveux, me donnant des coups de poing et des coups de pied. Ils ont même cassé mes lunettes. J’ai fui rapidement lorsque le concierge est arrivé à cause de mes cris. Pourquoi ? Je pensais avoir de bonnes relations avec tout le monde. Une enquête a été menée par la suite et on a découvert que, ce jour-là, le “jeu” du groupe consistait à attaquer la première fille blonde qu’ils rencontraient. Et je suis blonde. J’ai été traumatisée pendant des jours et je n’ai même pas pensé à retourner à l’école. Un jour, dans le mouvement catholique auquel j’appartiens, ils nous ont raconté comment ils avaient vécu l’invitation de Jésus à pardonner soixante-dix fois sept fois. Pour la première fois, j’ai réalisé à quel point il était difficile de pardonner. J’ai réfléchi et repensé pendant des jours. Puis j’ai compris que la force de pardonner est un don du Seigneur ressuscité. Je ne pouvais pas le faire moi-même. Et quand je suis retournée à l’école, libre et sereine, j’ai senti que j’avais fait un pas important dans ma vie de foi. (M. H. – Hongrie)
La « boîte du quartier » J’ai été frappée par cette définition entendue lors d’une de nos réunions communautaires : « Une ville, c’est une personne en relation avec une autre… » « Cela s’applique donc aussi à un quartier », ai-je conclu en pensant à l’endroit où j’habite. Depuis, chaque nouvelle journée me semble plus intéressante si je la vis comme une occasion d’établir des relations authentiques avec des voisins, des connaissances, etc. Ainsi, nous entrons dans les histoires les plus diverses, nous partageons les joies et les peines, nous découvrons des manières toujours nouvelles de répondre à certaines exigences. C’est le cas de la « boîte du quartier », née de l’idée de mettre en commun un peu d’argent pour certains besoins que nous connaissions : nous la mettons dans le garage que l’un d’entre nous a mis à disposition ; la porte n’est pas fermée à clé, donc tout le monde peut y accéder quand il en a besoin. Il y a deux phrases sur la boîte : « Donnez et il vous sera donné » et « Ceux qui aiment donnent avec joie ». L’argent récolté a déjà été utilisé pour acheter des chaussures, des vêtements, une caution pour une récupération, des prêts sans intérêt et des prêts sans retour. (A. – Italie)
Par Maria Grazia Berretta
(extrait de Il Vangelo del Giorno, Città Nuova, année X- n.1 mai-juin 2024)
Au feu rouge Une fois par semaine, je vais dans une plus grande ville rencontrer des amis avec lesquels je partage les mêmes idéaux. J’essaie d’emporter un peu plus d’argent pour aider les personnes qui mendient aux feux rouges. La semaine dernière, en rentrant chez moi, j’étais à l’arrêt au feu rouge et j’ai été abordé par un jeune homme prêt à nettoyer mon pare-brise. J’ai baissé la vitre et, tout en cherchant l’argent à lui donner, je lui ai dit de ne pas le nettoyer parce qu’il n’y arriverait pas avant que le feu ne passe au vert.
Il m’a regardé et m’a dit : « Pouvez-vous m’en donner plus ? Je dois acheter du poulet pour mes enfants ». J’ai répondu par l’affirmative. En fait, ce que je lui donnais n’était pas suffisant. Il a pris l’argent et m’a dit : « Laissez-moi le nettoyer ? Je vous promets de le faire vite ».
Presque sans attendre ma réponse, il a commencé à nettoyer le pare-brise et a terminé juste avant que le feu ne passe au vert. En rentrant chez moi, j’ai réfléchi à ce qui s’était passé et j’ai réalisé que les petits gestes nous édifient parfois et nous en apprennent plus sur nous-mêmes que sur les personnes pour lesquelles nous les faisons. Je sais que Dieu est partout, mais il ne m’est jamais venu à l’esprit qu’il m’attendait au feu rouge. (S. Z. – Argentine)
En prison J’avais fini en détention pour mineurs pour trafic de drogue ; je continuais à recevoir la visite de Valerio, mon professeur à l’époque où j’allais à l’école. Cela ne me laissait pas indifférent. Si, dans la vie, j’ai eu affaire à des personnes mal intentionnées que je croyais être des amis, ce n’était pas le cas de Valerio : il m’aimait sans aucun intérêt. De plus, il me racontait des histoires d’autres garçons qui avaient fait un choix différent du mien, des récits évangéliques. Un jour, un nouvel “invité” est arrivé dans ma cellule : un garçon si sale qu’il sentait mauvais. Ses camarades ont commencé à l’insulter, à lui cracher dessus et à lui ordonner d’aller se laver. Comme il n’avait ni savon, ni serviette, ni vêtements de rechange, je suis intervenu pour le défendre et je lui ai donné mes vêtements, mon savon et ma serviette. Il est allé prendre une douche et le calme est revenu. Cette expérience a marqué le début d’un changement. Je pensais que pour tout ce que j’avais fait, l’amour avait disparu en moi. Au contraire, il était comme une graine qui, plus vivante que jamais, commençait à fleurir. (T. – Italie)
Aux soins de Maria Grazia Berretta
(extrait de Il Vangelo del Giorno, Città Nuova, année X- no.1 mai-juin 2024)