Mouvement des Focolari

PAROLE DE VIE DE MARS 2001

C’est à la fin de la parabole bien connue du “ fils prodigue ”, que l’on trouve cette phrase. Ces mots veulent nous montrer la grandeur de la miséricorde de Dieu. Ils forment la conclusion d’un chapitre entier de l’Évangile de Luc, dans lequel Jésus raconte deux autres paraboles illustrant le même thème.
Il s’agit, tu t’en souviens, de l’épisode de la “ brebis perdue ”, pour laquelle le berger laisse les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert ?   Et de celui de la pièce égarée et de la joie de la femme qui, l’ayant retrouvée, réunit ses amies et ses voisines pour qu’elles se réjouissent avec elle. 

« Il fallait festoyer et se réjouir, parce que ton frère que voici était mort et il est vivant, il était perdu et il est retrouvé. »

Par cette phrase Dieu t’invite – et invite tous les chrétiens – à se réjouir avec lui, à être en fête et à participer à sa joie pour le retour du pécheur qui s’était égaré et qui revient. Dans le contexte de la parabole, le père s’adresse à son fils aîné qui vivait avec lui, partageant tout, mais qui, après une journée de dur travail, refuse d’entrer dans la maison où l’on fête le retour de son frère.
Le père va alors au-devant du fils qui lui était resté fidèle, tout comme il avait été à la rencontre de son autre fils, celui qui s’était perdu. Il s’efforce de le convaincre. Le contraste entre les sentiments du fils et ceux du père est évident : l’amour du père est sans mesure et sa joie est telle qu’il voudrait la faire partager à tous. Le fils nourrit du mépris et de la jalousie envers son frère qu’il ne reconnaît plus comme tel puisqu’il déclare à son sujet : “ Ton fils qui revient après avoir dévoré ton bien ”  .
La joie du père et son amour pour son enfant retrouvé font d’autant plus ressortir la rancœur du fils. Rancœur qui révèle un rapport superficiel, sinon faux, avec le père lui-même. Le travail, l’accomplissement de son devoir tiennent à cœur à l’aîné des deux enfants. Mais il n’aime pas son père comme un fils. Il semble plutôt qu’il lui obéit comme à un patron.

« Il fallait festoyer et se réjouir, parce que ton frère que voici était mort et il est vivant, il était perdu et il est retrouvé. »

En prononçant ces mots, Jésus dénonce un danger que nous pouvons courir nous aussi : celui de nous efforcer d’être une personne “ comme il faut ”, en investissant surtout dans la recherche de notre perfection et en jugeant nos frères moins “ bien ” que nous. En réalité si tu es “ attaché ” à la perfection, tu te forges une personnalité sans Dieu, tu es imbu de toi-même, plein d’admiration pour ta personne. Comme le fils resté à la maison, qui vante ses mérites devant son père : “ Voilà tant d’années que je te sers sans avoir jamais désobéi à tes ordres ”  .

« Il fallait festoyer et se réjouir, parce que ton frère que voici était mort et il est vivant, il était perdu et il est retrouvé. »

Par ces mots, Jésus dénonce l’erreur selon laquelle le rapport avec Dieu découlerait uniquement de l'observance des commandements. Non, il ne suffit pas d'observer les commandements, ce dont la tradition judaïque était d'ailleurs bien consciente.
Par cette parabole, Jésus veut souligner l'amour de Dieu : il nous présente un Dieu-Amour qui fait le premier pas vers l'homme sans tenir compte du fait qu’il le mérite ou non. Mais il veut que l’homme s’ouvre à lui pour pouvoir établir une authentique communion de vie. Naturellement, on le comprend clairement, nous faisons obstacle à Dieu-Amour quand, au lieu de lui donner notre cœur, nous accumulons des réalisations, des activités.

« Il fallait festoyer et se réjouir, parce que ton frère que voici était mort et il est vivant, il était perdu et il est retrouvé. »

Par ces mots, Jésus t’invite à avoir, vis-à-vis du pécheur le même amour sans mesure qu’a le Père. Jésus t’appelle à ne pas juger selon tes critères l’amour que le Père a envers tout homme.

En invitant son fils aîné à partager sa joie pour le retour du fils, le Père nous propose, à nous aussi, un changement de mentalité : en pratique, il nous faut accueillir comme des frères ceux envers qui nous pourrions nourrir des sentiments de mépris ou de supériorité. Cela provoquera en nous une vraie conversion. En agissant ainsi, nous serons libérés de la conviction d’être meilleurs que les autres. Nous éviterons l’intolérance religieuse et nous pourrons accueillir le salut que Jésus nous a procuré comme un don gratuit de l’amour de Dieu.

CHIARA LUBICH

 

PAROLE DE VIE DE FEVRIER 2001

T’est-il jamais arrivé de recevoir un cadeau d’un ami et de ressentir tout de suite le besoin d’y répondre ? Non pas tant pour t’acquitter d’une dette, mais poussé par un véritable amour reconnaissant ? Je suis sûre que si.
Si cela t’arrive, à toi, imagine combien plus cela peut arriver à Dieu, lui qui est Amour. Il nous comble toujours, chaque fois que nous donnons, en son nom, quelque chose à l’un de nos prochains. C’est une expérience que les chrétiens authentiques font très souvent. Et chaque fois, c’est une surprise. On ne s’habitue jamais à l’imagination de Dieu. On pourrait donner mille, dix mille exemples, on pourrait en écrire un livre entier. Et l’on verrait combien l’image de la “ bonne mesure, tassée, secouée, débordante, qu’on vous versera dans le pan de votre vêtement ” exprime réellement l’abondance et la générosité avec laquelle Dieu nous répond.
“ La nuit était déjà tombée sur Rome. Dans l’appartement du sous-sol qu’elles occupaient, le petit groupe de jeunes filles qui voulaient vivre l’Evangile – c’était les premiers temps du Mouvement – se souhaitaient une bonne nuit. Mais voilà qu’on sonne à la porte. Qui cela pouvait-il bien être à une heure pareille ? Un homme se présente, désespéré, au bord de la panique : il doit être expulsé de chez lui le lendemain avec sa famille, parce qu’il n’a pas payé son loyer. Les jeunes filles se regardent, et d’un commun accord, elles ouvrent le petit tiroir où elles ont rassemblé ce qui reste de leurs salaires. Elles donnent tout à cet homme, sans faire de raisonnements. Cette nuit-là elles dorment heureuses. Quelqu’un d’autre se serait occupé d’elles. Le jour n’est pas encore levé, que le téléphone sonne. “J’arrive tout de suite en taxi” dit la voix de l’homme de la veille. Toutes surprises par le choix d’un tel moyen de transport, les jeunes filles attendent. Le visage de leur visiteur montre que quelque chose a changé : “Hier soir, à peine rentré à la maison, j’ai trouvé un héritage que jamais je n’aurais imaginé recevoir. Mon cœur m’a dit de vous en donner la moitié.” C’était exactement le double de ce la somme qu’elles avaient donné généreusement. ”

« Donnez et on vous donnera ; c’est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante, qu’on vous versera dans le pan de votre vêtement. »

En as-tu fais toi aussi l’expérience ? Si ce n’est pas le cas, souviens-toi qu’il faut donner de façon désintéressée, sans espoir de retour, à quiconque te demande.
Essaye. Mais fais-le par amour de Dieu et non pas pour obtenir un résultat.
Tu me diras : “ Mais je n’ai rien ”.
Ça n’est pas vrai. Nous possédons de véritables trésors si nous le voulons : notre temps libre, notre cœur, notre sourire, nos conseils, notre culture, notre paix, notre parole pour convaincre celui qui possède de donner à celui qui n’a pas…
Tu diras encore : “ Je ne sais pas à qui donner ”.
Regarde autour de toi : te souviens-tu de tel malade à l’hôpital, de la dame veuve qui souffre de solitude, de ton camarade complètement découragé parce qu’il ne réussit pas à l’école, du jeune chômeur toujours triste, de ton petit frère qui a besoin de ton aide, de tel ami en prison, de l’apprenti peu sûr de lui ? C’est en eux que le Christ t’attend.
Vis selon le nouveau style d’un vrai chrétien – dont l’Evangile est tout imprégné – ce qui est le contraire du repliement sur soi. Arrête de placer ta sécurité dans les biens de ce monde et appuie-toi sur Dieu. C’est là que ta foi en lui se manifestera et elle sera bientôt confirmée par ce qu’il te donnera en retour.
Ce n’est ni pour t’enrichir ni pour nous enrichir que Dieu se comporte ainsi. Il le fait pour que d’autres personnes, beaucoup d’autres, après avoir vu les petits miracles qui s’accumulent quand nous donnons, agissent de la même manière.
Il le fait pour qu’en possédant plus nous puissions donner plus ; et pour que – en véritables administrateurs des biens de Dieu – nous fassions tout circuler dans la communauté qui nous entoure, à tel point que l’on puise dire d’elle comme de la première communauté de Jérusalem : “ Nul parmi eux n’était pauvre ”  . Ne sens-tu pas qu’ainsi tu peux concourir à donner une âme authentique à la révolution sociale que le monde attend ?
“ Donnez et on vous donnera. ” Jésus pensait certainement d’abord à la récompense que nous aurons au Paradis, mais tout ce qui arrive sur cette terre en est déjà le prélude et la garantie.

CHIARA LUBICH

 

PAROLE DE VIE DE JANVIER 2001

Ces paroles de l’Écriture sont proposées à la réflexion des chrétiens au cours de la Semaine de prière pour l’unité que l’on célèbre durant ce mois de janvier. Elles sont peut-être la définition la plus haute et la plus complète que Jésus donne de lui-même dans les Évangiles. Elles représentent une synthèse de sa mission et de son identité. Il le dit pour nous, afin que nous puissions trouver en lui l’unique chemin et la voie la plus sûre qui mène au Père. Il termine en effet le verset par ces paroles : « Personne ne va au Père si ce n’est par moi ». Jésus nous révèle par là ce qu’il est et ce qu’il représente pour chacun.

« Je suis le chemin et la vérité et la vie. »

De quelle manière Jésus nous révèle-t-il qu’il est la vérité ? En rendant témoignage à la vérité par sa vie et son enseignement : « Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. »   La vérité, à laquelle Jésus s’identifie, désigne la personne de Jésus, sa parole, son œuvre. Nous vivons selon la vérité, nous sommes vérité dans la mesure où nous sommes la Parole de Jésus. Mais si Jésus est le chemin parce qu’il est la vérité, il l’est aussi parce qu’il est pour nous la vie. « Je suis venu pour que les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance. » 
Quand nous nous nourrissons de lui, qui s’est fait pain dans l’Eucharistie, et que nous vivons de sa Parole, le Christ grandit en nous. À notre tour – et comme condition pour qu’elle ne s’éteigne pas – nous devons communiquer cette vie qui est en nous en la donnant à nos frères, selon l’enseignement de Jésus.

«Je suis le chemin et la vérité et la vie. »

«Préparez le chemin du Seigneur » , criait le Baptiste dans le désert de Judée, se faisant l’écho du prophète Isaïe. Et voilà celui qui se présente comme le Seigneur-Chemin, comme Dieu fait homme afin que nous accédions au Père à travers son humanité. Mais quel chemin Jésus a-t-il emprunté ?
Fils de Dieu, qui est Amour, il est venu sur cette terre par amour, il a vécu par amour, en rayonnant d’amour, en donnant de l’amour, en portant la loi de l’amour, et il est mort par amour. Puis il est ressuscité et monté au ciel, accomplissant son dessein d’amour. On peut dire que la voie parcourue par Jésus n’a qu’un nom : amour. Pour le suivre, nous devons marcher sur ce chemin : la voie de l’amour.
Mais l’amour que Jésus a vécu et apporté est un amour spécial, unique. Ce n’est ni de la philanthropie, ni une simple forme de solidarité ou de bienveillance ; il ne s’agit pas non plus de pure amitié ou d’affection ; pas plus que de non-violence. C’est quelque chose d’exceptionnel, de divin : c’est l’amour même qui brûle en Dieu. Jésus nous a donné une flamme de cet incendie, un rayon de cet immense soleil : amour divin, allumé dans notre cœur par le baptême et par la foi, alimenté par les autres sacrements, dons de Dieu, qui demandent que nous remplissions notre rôle, que nous adhérions totalement.
Comment faire fructifier cet amour ? En aimant. Nous ne sommes chrétiens à part entière que si nous apportons cette contribution décisive. En aimant, nous suivrons Jésus, le chemin, et nous servirons comme lui de chemins vers le Père pour beaucoup de nos frères et de nos sœurs.
Si nous vivons ensemble ce commandement de l’amour que nous a donné Jésus nous serons des chrétiens plus convaincants.
Et bien que l’unité entre nous, disciples du Christ, ne soit pas encore parfaite, nous pouvons, par notre vie, donner la preuve que nous nous aimons réciproquement. Nous serons alors témoins de la promesse de Jésus : « Là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom – ce que certains Pères de l’Église interprètent comme “en mon amour” – je suis au milieu d’eux. »
Nous pouvons déjà, nous chrétiens, profiter de ce don de la présence de Jésus, par exemple entre un catholique et un anglican, entre une orthodoxe et une méthodiste, entre un vaudois et un arménien. Jésus au milieu des siens ! Lui-même alors pourra dire au monde qui ne le connaît pas encore : « Je suis le chemin et la vérité et la vie. »
Au cours de ce mois, pénétrons-nous encore davantage de ceci : l’unité des chrétiens est avant tout une grâce, un grand cadeau qu’il nous faut demander. Comptons sur la prière faite en commun, car Jésus a dit : « Je vous le déclare encore, si deux d’entre vous, sur la terre, se mettent d’accord pour demander quoique ce soit, cela leur sera accordé par mon Père qui est aux cieux. » 

CHIARA LUBICH

 

PAROLE DE VIE DE DÉCEMBRE 2000

Cette invitation de Jésus à rester éveillés se trouve en saint Luc dans le passage où il est question de la seconde venue du Fils de l’Homme : celle-ci adviendra pour l’univers créé au moment où l’on s’y attendra le moins et, pour chacun d’entre nous, elle aura lieu lors de notre mort physique, jour de notre rencontre face à face avec le Seigneur.
“ Levez-vous et priez ” dit encore Jésus au Jardin des Oliviers, afin de préparer ses disciples au scandale de sa passion.
Ces simples mots renferment le secret qui permet d’affronter aussi bien les événements dramatiques de la vie que les inévitables épreuves quotidiennes.
Vigilance et prière sont indispensables l’une à l’autre : on ne veille pas sans prier, et on ne prie pas sans être spirituellement éveillé. Déjà, les premiers ascètes du désert cherchaient de toutes leurs forces à conjuguer ces deux vertus, pour qu’aucune tentation ne puisse les cueillir par surprise. Et nombreux furent les moyens qu’ils imaginèrent pour rester vigilants et recueillis dans la prière.
Mais aujourd’hui, dans le rythme frénétique où la vie nous entraîne, comment réussir à ne pas nous laisser séduire par le chant de si nombreuses sirènes ? Et pourtant ces paroles de l’Évangile sont faites pour nous aussi…

« Restez éveillés dans une prière de tous les instants. »

Jésus ne peut pas nous demander quelque chose que nous ne serions pas en mesure de réaliser, même aujourd’hui. Il ne peut nous exhorter à faire quelque chose sans nous donner aussi le moyen de vivre selon sa parole.
Comment rester alors éveillés et sur nos gardes, comment être sans cesse recueillis dans la prière ? Peut-être avons-nous cherché à le faire en nous protégeant de tout et de tous ? Mais ce n’est pas la bonne route, et l’on ne tarde pas à s’apercevoir qu’il faudra, un jour ou l’autre, rebrousser chemin.
La voie qu’il faut suivre, nous la trouvons aussi bien dans l’Évangile que dans l’expérience humaine. Quand on aime une personne, notre cœur veille sans cesse tandis que nous l’attendons, chaque minute qui passe sans elle est vécue en fonction d’elle. Celui qui aime est un bon veilleur. Veiller est le propre de l’amour.
C’est ce que nous enseigne aussi la parabole des vierges sages et des vierges insensées. Quand on attend quelqu’un que l’on aime, on est vigilant ; on n’a pas d’effort à faire pour rester éveillé, car plus fort est le sentiment qui nous tient debout et nous rend prêts à la rencontre.
C’est ce que l’on vit en famille lorsque, éloignés les uns des autres, on attend de se revoir.
C’est ce que font une maman ou un papa au chevet de leur enfant malade, quand ils s’accordent quelques moments de repos. Ils dorment, mais leur cœur veille.
C’est ainsi qu’agit celui qui aime Jésus. Il fait tout en fonction de Lui, Lui qu’il rencontre à tout moment dans les manifestations simples de sa volonté, et qu’il rencontrera solennellement au jour de sa venue. La liturgie de ce mois nous prépare d’ailleurs à une prière vivante, une prière d’attente, d’accueil de dons, du Don : la naissance de Jésus sur cette terre, que l’on va célébrer au début de ce troisième millénaire.

« Restez éveillés dans une prière de tous les instants. »

La prière continuelle est aussi une question d’amour car, à part les moments dédiés à l’oraison, toute l’existence quotidienne peut devenir prière, offrande, entretien silencieux avec Dieu.
Ce sourire à donner, ce travail à accomplir, cette voiture à conduire, ce repas à préparer, cette activité à organiser, cette larme à verser pour le frère ou la sœur qui souffre, cet instrument à jouer, cet article ou cette lettre à écrire, cet événement joyeux à fêter, ce vêtement à nettoyer… Si nous faisons tout cela par amour, cela peut devenir prière.
Pour veiller, pour prier sans cesse, il faut donc être dans l’amour : aimer la volonté de Dieu et chaque prochain qu’il placera à nos côtés.
Aujourd’hui j’aimerai. Aujourd’hui je veillerai et je prierai à chaque instant.

CHIARA LUBICH

 

PAROLE DE VIE DE NOVEMBRE 2000

S’il est, dans l’Écriture, un mot qui, à lui seul, exprime plus que tout autre la révélation de Dieu en Jésus Christ, c’est le mot “miséricorde”.
Dans la grandiose théophanie (= révélation de Dieu) du Sinaï, le Seigneur avait dit à Moïse : “ Je suis un Dieu miséricordieux et bienveillant, qui reste fidèle à des milliers de générations ” .
À l’aube de la venue du Messie, Marie annonce à Élisabeth que le Tout Puissant s’est souvenu de sa miséricorde , et ce qui vient d’être conçu en elle en est la preuve. En Jésus, fils de Dieu et de Marie, l’amour paternel et l’amour maternel de Dieu se rejoignent. Le sens de ces deux expressions de l’amour est rendu, on ne peut mieux, par deux mots hébreux qui sont utilisés pour signifier la miséricorde : une attitude de profonde bonté qui manifeste que Dieu est fidèle à lui-même et l’émoi des “ entrailles de mère ” envers chaque homme.
Mais qu’est-ce qui rend la miséricorde aussi puissante et lui donne toujours le dessus sur la justice ?
Et pourquoi Jésus met-il cette vertu autant en relief, au point d’en faire une condition pour notre salut personnel ?

« Heureux les miséricordieux : il leur sera fait miséricorde. »

Comme l’explique Jean-Paul II, la miséricorde est “ la dimension indispensable de l’amour, elle est comme son deuxième nom ”  . Pour lui, cette béatitude constitue une synthèse de toute la Bonne Nouvelle où Dieu nous révèle son amour salvifique, et est une invitation faite à tous d’être “ miséricordieux comme le Père ”  et comme celui qui en est l’image fidèle, Jésus.
Dans la prière du Notre Père, on retrouve la même idée exprimée en d’autres termes : “ Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ”. Au ciel, s’applique la loi selon laquelle nos fautes nous sont remises dans la mesure où nous remettons celles de nos frères et sœurs.
Le thème de la miséricorde et du pardon est une constante de tout l’Évangile. Dans la nuit qui précède sa passion, en prononçant son ultime prière au Père, Jésus nous fait connaître l’objectif qu’il a toujours eu devant Lui : l’unité de tous, hommes et femmes, en une grande famille qui se modèle sur la Trinité. Tout son enseignement est tendu à nous communiquer son amour d’une part et, d’autre part, à nous donner l’instrument pour réaliser la communion entre nous et avec Dieu. Et la miséricorde est justement l’ultime expression de l’amour, de la charité, car elle l’accomplit et la rend parfaite.

« Heureux les miséricordieux : il leur sera fait miséricorde. »

Que toutes nos relations avec les autres soient vécues dans un amour empreint de miséricorde !
La miséricorde est un amour qui sait accueillir chaque prochain, spécialement le plus pauvre et le plus nécessiteux. Un amour sans mesure, abondant, universel, concret. Un amour qui tend à susciter la réciprocité, fin ultime de la miséricorde, sans laquelle n’existerait que la justice qui, si elle peut susciter l’égalité, est incapable de créer la fraternité.
De nos jours, on entend souvent parler de pardon refusé à de grands criminels. On réclame vengeance plutôt que justice. Il faut, au contraire, après avoir fait tout le possible pour que les dommages soient réparés, laisser place en nous au pardon, seul capable de guérir les traumatismes personnels et sociaux engendrés par le mal. “ Pardonnez et l’on vous pardonnera ”  .
Alors, si nous avons subi quelque offense, quelque injustice, pardonnons et nous serons pardonnés. Soyons les premiers à user miséricorde, à exprimer notre compassion !
Même si cela nous semble difficile et ardu, demandons-nous, face à chaque prochain : comment sa mère se comporterait-elle en face de lui ? Cette pensée nous aidera à comprendre et à vivre selon le cœur de Dieu.

CHIARA LUBICH

 

PAROLE DE VIE D’OCTOBRE 2000

Cette phrase est essentielle pour comprendre ce que Jésus pense de la richesse.
C’est une image forte, paradoxale, propre au style sémitique. Il existe une incompatibilité entre la richesse et le royaume de Dieu et il est inutile de vouloir diluer un enseignement que nous retrouvons plusieurs fois dans la prédication de Jésus : lorsqu’il dit, par exemple, qu’on ne peut servir à la fois Dieu et Mammon, (c’est-à-dire l’argent)  , ou quand il semble demander au jeune homme riche des renoncements impossibles à l’homme mais non pas à Dieu .
Mais essayons de comprendre le véritable sens de cette parole en regardant Jésus lui-même et sa manière de se comporter avec les riches.
Il arrive qu’il fréquente des personnes aisées. À Zachée, qui ne donne que la moitié de ses biens, il déclare : “ Aujourd’hui le salut est venu pour cette maison  . ” Et les Actes des Apôtres témoignent que dans l’Église primitive la communion des biens était spontanée et libre  .
Jésus n’avait donc pas l’intention de fonder une communauté dont ne feraient partie que des personnes appelées, pour le suivre, à laisser de côté toute richesse.
Pourtant il affirme :

« Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu. »

Qu’est-ce qui est alors condamné par Jésus ? Certainement pas les biens de cette terre en eux-mêmes mais ceux qui y sont attachés.
Et pourquoi ? C’est clair : parce que tout appartient à Dieu, tandis que le riche se comporte comme si les richesses étaient à lui.
Le fait est que les richesses prennent facilement la place de Dieu dans le cœur humain, elles aveuglent et facilitent tous les vices. L’Apôtre Paul écrivait : “ Quant à ceux qui veulent s’enrichir, ils tombent dans le piège de la tentation, dans de multiples désirs insensés et pernicieux, qui plongent les hommes dans la ruine et la perdition. La racine de tous les maux, en effet, c’est l’amour de l’argent. Pour s’y être livrés, certains se sont égarés loin de la foi et se sont transpercés l’âme de tourments multiples . ”
Quelle attitude doit alors avoir celui qui possède des biens ? Il faut qu’il ait le cœur libre, totalement ouvert à Dieu, qu’il se sente l’administrateur de ses biens, et qu’il sache, comme le dit Jean Paul II, que sur la propriété pèse une “hypothèque sociale” .
Les biens de cette terre ne sont pas un mal en soi, il ne faut donc pas les déprécier mais en faire bon usage.
Ce n’est pas la main mais le cœur qui doit s’en tenir éloigné. Il s’agit de savoir les utiliser pour le bien d’autrui. Celui qui est riche l’est pour les autres.

« Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu. »

Quelqu’un pourrait se dire : comme je ne suis pas vraiment riche, ces paroles ne me concernent pas.
Il faut y prendre garde. Tout de suite après cette affirmation, les disciples consternés adressent au Christ cette question : “ Qui donc peut être sauvé ? ”   Cela prouve qu’ils avaient clairement compris que ces paroles s’adressaient à tout un chacun.
Même quelqu’un qui a tout quitté pour suivre Jésus peut avoir le cœur attaché à d’innombrables choses. Et le mendiant qui maugrée si l’on touche à son baluchon peut être un riche devant Dieu.
Et pourtant, dans l’histoire de l’Église, nombreux sont les riches qui ne se sont pas dérobés et qui ont suivi Jésus dans la voie de la pauvreté la plus radicale. Ce fut le cas d’Eletto, que j’ai bien connu : c’était un jeune grand, beau, intelligent et riche. Quand il a senti l’appel à suivre Jésus il n’a pas hésité un instant. Il n’a pas regardé en arrière. On aurait dit que les richesses n’existaient pas pour lui. Il a donné tous ses biens et jusqu’à sa vie. Tandis qu’il accomplissait un acte d’amour envers un jeune, il a trouvé la mort en se noyant dans un lac, alors qu’il n’avait que 33 ans. Là sur la rive, une plaque commémorative rapporte ses paroles : “ J’ai choisi Dieu seul et rien d’autre. ”
Eletto, en se présentant devant Jésus, ne s’est sûrement pas entendu dire : “ Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu. ”

CHIARA LUBICH