Nous sommes tous appelés à cette conversion permanente en recommençant sans cesse, au cas où nous nous serions arrêtés ; nous devons tous expérimenter cette sorte de renaissance, cette plénitude de vie. Nous devons chercher à transformer le plus possible en charité envers le prochain toutes les expressions de notre existence. Et voici, devant mes yeux, cette page superbe qui évoque le jugement dernier : Jésus viendra pour nous juger et nous dira : « J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire » (Mt 25, 35). Ces paroles m’ont frappée comme si je les lisais pour la première fois. Je redécouvrais qu’à l’examen final, Jésus ne me demanderait pas de comptes sur telle ou telle action que je dois pourtant accomplir, mais centrerait tout sur l’amour du prochain. Comme si j’entamais aujourd’hui mon ascension vers Dieu, je me suis mise alors à aimer tous ceux que je rencontrais durant la journée. Et vraiment, je me suis sentie renaître. J’ai compris que mon âme avait surtout soif d’amour, soif d’aimer ; et qu’elle trouvait sa respiration, sa nourriture et sa vie dans l’amour envers tous. Il est vrai qu’auparavant aussi j’essayais d’accomplir de nombreux actes d’amour. Mais, je m’en rends compte aujourd’hui, ils n’étaient parfois que l’expression d’une spiritualité trop individuelle, entretenue par des pénitences plus ou moins grandes ; et pour nous, qui sommes appelés à l’amour, ce peut être, malgré notre bonne volonté, l’occasion d’un certain repliement sur nous-mêmes. Dans ce nouvel effort pour aimer tout le monde, je peux faire encore de nombreux actes d’amour, mais ils sont tous dirigés vers le frère, en qui je peux voir et aimer Jésus. C’est là que se trouve la plénitude de la joie. Nous sommes tous appelés à cette conversion permanente ; nous devons tous expérimenter cette sorte de renaissance, cette plénitude de vie. Nous devons chercher à transformer le plus possible en charité envers le prochain toutes les expressions de notre existence. Si nous avons à vaquer aux soins de la maison, ne le faisons pas seulement pour des raisons humaines, mais parce que Jésus nous demande de l’aimer, de le vêtir, de le nourrir, de le servir dans nos frères. Avons-nous quelque travail à faire ? C’est un moyen d’apporter notre contribution à Jésus, dans les personnes et dans la communauté. Avons-nous à prier ? Faisons-le toujours pour nous et pour les autres, en utilisant ce « nous » que Jésus a enseigné dans le « Notre Père ». Sommes-nous appelés à souffrir ? Offrons notre souffrance pour nos frères. Avons-nous quelqu’un à rencontrer ? Que ce soit toujours avec l’intention d’écouter Dieu en lui, de le conseiller, de l’instruire, de le consoler… en un mot, de l’aimer. Devons-nous nous reposer, manger, nous détendre ? Faisons-le avec l’intention de reprendre des forces pour mieux servir le frère. Faisons tout, en somme, en vue du prochain. […] C’est pourquoi, pour que se produise une telle reconversion en nous, gardons à l’esprit dans les jours qui viennent […] l’engagement à « Renaître par l’amour ».
Chiara Lubich
(d’une liaison téléphonique, Rocca di Papa, 20 mars 1986) Extrait de : Chiara Lubich, Sur les pas du Ressuscité, Ed. Nouvelle Cité, 1992, p.73-74.
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