Mouvement des Focolari

Juillet 2006

« Le Seigneur est proche de tous ceux qui l’invoquent, de tous ceux qui l’invoquent vraiment. »

Le poème (ou psaume) d’où est tirée cette Parole de vie est tout entier un hymne de louange à Dieu. Rien n’échappe à son grand amour : il enveloppe l’univers entier et se penche sur tout être vivant, sur la moindre de ses créatures.
La créature, quant à elle, est dépeinte comme invoquant son Seigneur pour sa nourriture et les nécessités de la vie. Et Dieu ouvre ses mains avec générosité. Il prend soin de tous, soutenant celui qui est faible et redressant celui qui fléchit . Il remet sur le droit chemin celui qui s’était égaré.

« Le Seigneur est proche de tous ceux qui l’invoquent, de tous ceux qui l’invoquent vraiment. »

Loin d’être un Dieu absent, lointain, indifférent au sort de l’humanité, le Seigneur est attentif au sort de chacun d’entre nous. Nous le constatons bien souvent. Pourtant, il nous arrive parfois de nous sentir abandonnés, seuls, fragiles, désemparés face à des situations qui nous dépassent.
Voilà que naissent en nous des sentiments de révolte ou d’antipathie, voire de haine, envers certaines personnes. Des situations sans issue depuis des années, en famille ou dans notre milieu de travail, nous oppressent. Nous nous sentons l’objet de méfiances – petites ou grandes – de jalousies, d’envies, victimes de tyrannies. Ou bien encore nous avons l’impression d’étouffer dans un monde endurci par les passions et le carriérisme, en manque d’idéal, de justice et d’espérance.
Notre cœur semble crier : « Seigneur, où es-tu ? ». « M’aimes-tu vraiment ? Nous aimes-tu réellement ? Mais alors, pourquoi tout cela arrive-t-il ? »
Et voilà que la Parole de vie éveille en nous une certitude : nous ne sommes jamais seuls.

« Le Seigneur est proche de tous ceux qui l’invoquent, de tous ceux qui l’invoquent vraiment. »

Cette parole nous invite à raviver notre foi : Dieu existe et il m’aime. Je peux et je dois le réaffirmer en chacune de mes actions, devant chaque événement : Dieu m’aime. Je rencontre une personne ? Je dois croire que Dieu a quelque chose à me dire à travers elle. Je me consacre à un travail ? Je continue à ce moment-là à avoir foi en son amour. Une souffrance survient ? Je crois que Dieu m’aime. Arrive une joie ? Dieu m’aime.
Il est ici avec moi, il est toujours avec moi, il sait tout de moi et partage chacune de mes joies, de mes pensées, de mes désirs, il porte avec moi chaque préoccupation, chacune de mes épreuves.

« Le Seigneur est proche de tous ceux qui l’invoquent, de tous ceux qui l’invoquent vraiment. »

Comment raviver cette certitude ? Voici quelques suggestions.
Puisqu’il nous le demande : invoquons-le ! Le Seigneur était bien dans la barque de Pierre quand la tempête s’est déchaînée, mais les disciples se sentaient seuls et sans défense, parce que Jésus dormait. Ils l’appelèrent : « Seigneur, au secours, nous périssons ! »  et il calma le vent et la mer.
Jésus lui-même, sur la croix, n’a plus ressenti la proximité du Père. Il l’invoqua par la plus bouleversante des prières : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » . Parce qu’il a cru à l’amour du Père et s’est remis à nouveau entre ses mains, le Père l’a ressuscité d’entre les morts.
Comment faire grandir notre foi en sa présence ?
En le cherchant au milieu de nous. Il a promis d’être là où deux ou trois sont unis en son nom . Partageons entre nous ce que la Parole nous a permis de vivre et nous constaterons les fruits de sa présence : joie, paix, lumière, courage.
Il restera avec nous et nous continuerons à le sentir proche et agissant dans notre quotidien.

Chiara LUBICH

La Parole de Vie du mois de juillet est extraite des lectures du dimanche 30 juillet 2006.
Le mois prochain : « Soyez bons les uns pour les autres, ayez du cœur ; pardonnez-vous mutuellement, comme Dieu vous a pardonné en Christ » (Ep 4, 32).

Commentaire de Chiara Lubich

« Marchez sous l’impulsion de l’Esprit […]. Si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes plus soumis à la loi » (Ga 5, 16. 18).

« C’est à la liberté que vous avez été appelés » . Paul de Tarse s’adresse en ces termes aux chrétiens des communautés de Galatie, faisant écho aux paroles de Jésus : « Vous serez réellement des hommes libres » .
Mais libres de quoi ? Les chrétiens de Galatie avaient été libérés des prescriptions de la loi de Moïse, et cette liberté s’était ensuite étendue à tous les chrétiens. Plus encore, nous avons été libérés du péché et de ses conséquences : nos peurs, la recherche effrénée de nos intérêts, les conditionnements culturels, les conventions sociales… Nous sommes donc libres en observant les normes religieuses et sociales du christianisme, car nous ne les ressentons pas comme des obligations imposées de l’extérieur.
La loi nouvelle qui nous a été donnée, Saint Paul l’appelle la « loi du Christ » . Elle est inscrite dans notre cœur, elle jaillit de l’intérieur de la personne renouvelée par l’amour de Jésus. C’est une « loi de liberté »  qui contient en même temps la force de la vivre.
Nous sommes libres parce que guidés par l’Esprit de Jésus qui vit en nous. D’où l’invitation :

« Marchez sous l’impulsion de l’Esprit […]. Si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes plus soumis à la loi. »

En cette période de Pentecôte, nous revivons l’événement de la descente de l’Esprit sur Marie et les disciples réunis au Cénacle. Par ses langues de feu, il a répandu l’amour de Dieu dans nos cœurs . Voilà la « loi nouvelle » : c’est l’amour.
L’Esprit Saint est l’Amour de Dieu qui transforme notre cœur en venant en nous, qui y insuffle son amour et qui nous apprend à agir dans l’amour et par amour.
L’amour nous fait progresser, nous suggérant la réponse aux situations et aux choix de la vie. Il nous enseigne à discerner « Cela est bien, je le fais. Cela est mal, je ne le fais pas » et nous pousse à agir en recherchant le bien de l’autre.
Nous ne sommes pas guidés de l’extérieur, mais par un principe de vie nouvelle que l’Esprit a répandu en nous. Les forces, le cœur, l’esprit, toutes nos capacités peuvent marcher « sous l’impulsion du Saint Esprit », parce qu’elles sont unifiées dans l’amour et placées à la complète disposition du projet de Dieu sur nous et sur la société.
Nous sommes libres d’aimer.

« Marchez sous l’impulsion de l’Esprit […]. Si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes plus soumis à la loi. »

« Si vous êtes conduits par l’Esprit… » Sans cesse nous pouvons faire obstacle à la pleine possession par l’Esprit de notre cœur, de notre esprit. Nous pouvons même résister à sa voix et à ses suggestions au point de « l’attrister » , au point « d’éteindre sa présence en nous » . Nous préférons si souvent suivre nos désirs plutôt que les siens, notre volonté plutôt que la sienne.
Comment donc se laisser guider par cette voix qui parle au-dedans de nous ? Où nous emmène-t-elle ? Paul nous le rappelle quelques versets plus haut : toute la loi nouvelle se résume en un seul précepte : l’amour du prochain. En pratique, suggère l’apôtre, être libre signifie se faire l’esclave de l’autre, se mettre au service les uns des autres . Cette voix intérieure (= l’amour) nous pousse à être attentifs à ceux qui sont auprès de nous, à les écouter, à partager avec eux.
En définitive, toute Parole de vie nous conduit à aimer. Est-ce étrange ou exagéré ? Non, c’est la logique de l’Évangile.
Nous ne sommes des chrétiens authentiques que si nous vivons dans l’amour.

« Marchez sous l’impulsion de l’Esprit […]. Si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes plus soumis à la loi. »

Laissons à l’Esprit la liberté de nous conduire sur le chemin de l’amour. Nous pouvons le prier ainsi :
Tu es la lumière, la joie, la beauté.
Tu entraînes les âmes, enflammes les cœurs, suscites le désir de la sainteté et fais prendre des résolutions et des engagements inattendus.
Tu sanctifies.
Toi qui es si discret dans ton impétuosité bouleversante, toi qui souffles comme un zéphyr timide que bien peu savent entendre, ne nous tiens pas rigueur de notre rudesse, de notre grossièreté. Fais de nous tes fidèles. Que pas un jour ne passe sans que nous ne t’invoquions, te remerciions, t’adorions, t’aimions, sans que nous soyons tes disciples assidus. Voilà ce que nous te demandons.
Chiara LUBICH

La Parole de Vie du mois de juin est extraite des lectures du dimanche 4 juin 2006.

Commentaire de Chiara Lubich

« Je me rends compte en vérité que Dieu est impartial et qu’en toute nation, quiconque le craint et pratique la justice trouve accueil auprès de lui » (Ac 10, 34-35).

Comme est grand le cœur de Dieu ! Il ignore les divisions entre peuples et nations, entre ethnies et langues. Il ne voit en nous que ses enfants, d’égale dignité.
Pourtant, les premiers chrétiens de Jérusalem avaient bien du mal à comprendre cette mentalité ouverte et universelle. Tous issus d’un même peuple, et conscients d’appartenir au peuple élu, il leur était difficile d’établir des rapports de fraternité authentique avec des membres d’autres pays. Et ils avaient été scandalisés d’apprendre que Pierre, à Césarée, était entré dans la maison de Corneille, un centurion romain, un étranger. Pourquoi donc fréquenter ces gens-là ?
Mais pour Dieu, personne n’est étranger.
« Il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes » . Dieu aime tous les hommes, sans distinction.
Cela, Pierre l’avait affirmé devant le soldat romain, dépassant lui aussi tous les préjugés à l’égard d’autres peuples.

« Je me rends compte en vérité que Dieu est impartial et qu’en toute nation, quiconque le craint et pratique la justice trouve accueil auprès de lui. »

Si Dieu se comporte ainsi, nous devons, nous ses enfants, agir comme lui, ouvrir grand notre cœur, abattre toutes les barrières, nous libérer de tout esclavage.
Car ne sommes-nous pas devenus esclaves de nos divisions entre riches et pauvres, générations, races, cultures et nations ? Combien de préjugés portons-nous vis-à-vis des immigrés, des étrangers ? Que d’idées toutes faites n’entend-on pas sur ceux qui sont différents de nous ! Cela fait naître un sentiment d’insécurité, la crainte de perdre son identité, l’intolérance…
Et que dire des barrières encore plus subtiles séparant notre famille des autres, notre groupe religieux d’un autre qui suit d’autres orientations, les quartiers d’une même ville, les partis, les clubs sportifs… Ne cherchons pas plus loin l’origine des méfiances, des rancœurs sourdes et profondes, des inimitiés persistantes…
Avec un Dieu qui ne fait aucune différence entre les personnes, comment ne pas avoir à cœur la fraternité universelle ?

« Je me rends compte en vérité que Dieu est impartial et qu’en toute nation, quiconque le craint et pratique la justice trouve accueil auprès de lui. »

Étant tous frères et sœurs, aimons donc tous les hommes, en commençant par celui qui se trouve à côté de nous. Et ne nous arrêtons pas. Ainsi, notre amour ne sera ni platonique ni abstrait, mais concret, fait de service.
Aimons-les d’un amour capable d’aller à la rencontre de l’autre. D’engager un dialogue, de se mettre à la place de l’autre quand il est dans la peine, de porter le poids de ses préoccupations. Au point qu’il se sente compris et accueilli dans sa différence et libre d’exprimer toute la richesse qu’il porte en lui.
Un amour qui entretient des rapports vivants et actifs entre personnes de convictions différentes, sur la base de la « règle d’or » : « Fais aux autres ce que tu voudrais que l’on te fasse », reportée par tous les livres sacrés et inscrite dans les consciences.
Un amour qui nous pousse à mettre nos biens en commun, à aimer le pays de l’autre comme notre patrie, qui nous fait construire des structures nouvelles, qui croit possible de faire reculer les guerres, le terrorisme, la faim, les innombrables maux qui déchirent le monde.

« Je me rends compte en vérité que Dieu est impartial et qu’en toute nation, quiconque le craint et pratique la justice trouve accueil auprès de lui. »

Moira, une jeune indigène catholique du Guatemala, descendante des mayas Cakchiquel et aînée d’une famille de onze enfants, en a fait l’expérience. Les indigènes, victimes de nombreuses discriminations, ont un fort complexe d’infériorité vis-à-vis des métis et, plus encore, des blancs. Sa rencontre avec Fiore, l’une de mes premières compagnes de Rome, devait la marquer profondément.
Fiore, témoigne Moira, n’avait pas de préférence, sa façon d’être allait droit au cœur des gens et faisait tomber toute barrière :« Je n’oublierai jamais l’accueil chaleureux de Fiore. Son amour envers moi était un reflet de l’amour de Dieu. Ma culture indigène et l’éducation familiale m’avaient habituée à des comportements durs et fermés, qui éloignaient les gens de moi. Fiore a été pour moi une maîtresse, un guide, un modèle… et m’a aidée à sortir de moi pour m’ouvrir aux autres avec confiance. Elle m’a aussi proposé de reprendre mes études, m’a soutenue et encouragée lorsque, devant les difficultés de culture et de méthode, j’étais tentée de tout laisser tomber. Cela m’a permis d’obtenir mon diplôme de secrétariat. Elle m’a surtout donné conscience de ma dignité humaine et libérée de ce sentiment d’infériorité profondément ancré en moi. Depuis mon enfance, je rêvais de me lancer dans une bataille de libération de mon peuple. Fiore m’a fait comprendre que je devais commencer par moi-même. Il fallait que je sois “nouvelle”, si je voulais que naisse un “peuple nouveau”. »
Avec un Dieu qui ne manifeste de préférence pour aucun de ses enfants, on peut, comme Moira, avoir de grandes ambitions : « En disant oui à Dieu, je pouvais ouvrir une voie me permettant de faire connaître cette façon de vivre à mon peuple et je dois dire que cela s’est déjà en partie réalisé dans ma famille » .
Chiara LUBICH
La Parole de Vie du mois de mai est extraite des lectures du dimanche 21 mai 2006.

Commentaire de Chiara Lubich

« Si le grain de blé qui tombe en terre ne meurt pas, il reste seul ; si au contraire il meurt, il porte du fruit en abondance » (Jn 12, 24).

Plus éloquentes qu’un traité, ces paroles du Christ laissent entrevoir quel est le secret de la vie.
En Jésus, il n’y a pas de joie sans accepter la douleur ni de résurrection sans passer par la mort. Jésus, ici, parle de lui, il explique la signification de son existence. Il n’est qu’à quelques jours d’une mort atroce, humiliante. Pourquoi doit-il mourir, lui qui s’est justement proclamé la Vie ? Pourquoi doit-il souffrir, lui qui est innocent ? Pourquoi faut-il qu’il soit calomnié, giflé, qu’on se moque de lui et qu’il soit cloué sur une croix, pour subir la mort la plus infamante ? Et surtout, pourquoi lui, qui a vécu dans une union constante avec Dieu, devra-t-il se sentir abandonné de son Père ? Lui aussi a peur de la mort ; mais elle aura un sens : elle aboutira à la résurrection.
Il était venu pour réunir les enfants de Dieu dispersés , abolir toute barrière séparant les êtres et les peuples, ramener la fraternité entre les hommes divisés, apporter la paix et construire l’unité. Mais il y avait un prix à payer : pour attirer à lui tous les hommes, il devra être élevé de terre, sur la croix . Et il nous dit cette parabole, la plus significative, sans doute, de tout l’Évangile :

« Si le grain de blé qui tombe en terre ne meurt pas, il reste seul ; si au contraire il meurt, il porte du fruit en abondance »

Ce grain de blé, c’est lui.
En ce temps de Pâque, il nous apparaît du haut de la croix, dans son martyre et sa gloire, signe de l’amour extrême. Là, il a tout donné : le pardon à ses bourreaux, le paradis au larron ; à nous, il a donné son corps et son sang, sa vie, jusqu’à crier : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » J’écrivais dans une lettre en 1944 : « Sais-tu qu’il nous a tout donné ? Que pouvait nous donner de plus un Dieu qui, par amour, semble même oublier qu’il est Dieu ? » Et il nous a donné la possibilité de devenir enfants de Dieu : il a engendré un peuple nouveau, une nouvelle création.
Dès le jour de la Pentecôte, le grain de blé tombé en terre et mort fleurissait en un épi fécond : trois mille personnes, de tous peuples et de toutes nations, devenaient « un seul cœur et une seule âme », puis cinq mille, puis…

« Si le grain de blé qui tombe en terre ne meurt pas, il reste seul ; si au contraire il meurt, il porte du fruit en abondance »

Cette Parole donne aussi sens à notre vie, à nos souffrances, et à notre mort qui viendra un jour. La fraternité universelle pour laquelle nous voulons vivre, la paix, l’unité que nous voulons construire autour de nous ne sont qu’un vague rêve et une chimère si nous ne sommes pas prêts à parcourir le même chemin que le Maître.
Comment a-t-il fait pour « porter du fruit en abondance » ?
Il a tout partagé avec nous. Il a endossé nos souffrances. Il s’est fait avec nous ténèbres, tristesse, épuisement, contradiction… Il a éprouvé la trahison, la solitude, il s’est senti orphelin… Bref, il s’est fait « un avec nous », en prenant sur lui tout ce qui nous écrasait.
Comment ne pas être remplis d’amour pour ce Dieu qui s’est fait notre « prochain » ? Et comment lui exprimer notre reconnaissance pour son amour infini sinon en vivant comme il a vécu ? À notre tour, devenons les « prochains » de ceux qui passent auprès de nous dans la vie, en cherchant à nous « faire un » avec eux, à prendre sur nous les divisions, à partager une souffrance, à résoudre une difficulté, avec un amour concret fait de services rendus.
Jésus, dans son abandon, s’est donné tout entier ; en celui qui vit la spiritualité née de Lui et centrée sur Lui, doit resplendir pleinement le Ressuscité et la joie doit en être le témoignage.
Chiara LUBICH
La Parole de Vie du mois d’avril est extraite des lectures du dimanche 2 avril 2006.

Commentaire de Chiara Lubich

« Celui qui fait la vérité vient à la lumière » (Jn 3, 21).

« Faire » la vérité ? On pense d’ordinaire que celle-ci s’apprend ou se dit… Mais Jésus, une fois de plus, nous surprend. Pour lui, la vérité « se fait ».
Nicodème, un rabbin membre du Sanhédrin, en est lui aussi étonné. Alors qu’il demande à Jésus comment on peut entrer dans le Royaume des cieux, il s’entend répondre qu’il faut renaître, c’est-à-dire accueillir la vie nouvelle que Jésus est venu apporter, se laisser transformer intérieurement jusqu’à devenir enfant de Dieu et entrer ainsi dans son monde à lui. Plutôt qu’une conquête humaine, le salut est un don qui vient d’En Haut.
Nicodème, venu trouver Jésus de nuit, dans les ténèbres, en sort tout illuminé.

« Celui qui fait la vérité vient à la lumière. »

Cette Parole de vie nous invite à agir conformément à la vérité, à être cohérents avec l’Évangile. Elle nous demande de ne pas nous contenter d’écouter la Parole de Dieu, mais de la mettre en pratique . Comme l’affirme un Père de l’Église, Hilaire, évêque de Poitiers, « il n’est rien des paroles de Dieu qui ne doive s’accomplir ; et tout ce qui a été dit comporte la nécessité d’être mis en œuvre, car les paroles de Dieu sont des décrets. »
Foi et comportement moral sont étroitement liés.
L’entretien profond de Jésus avec Nicodème nous indique clairement qu’en Jésus la lumière, la vie et l’amour en acte coïncident. Il en sera donc de même pour ceux qui, accueillant le Christ, deviennent en lui enfants de Dieu. « Celui qui obéit au Seigneur et suit, par son intermédiaire, l’Écriture – écrit Clément d’Alexandrie, un autre père de l’Église – est transformé pleinement à l’image de son Maître : il se met à vivre comme Dieu de chair » .
Or, même celui qui ne reconnaît aucune religion n’est pas exempté d’être cohérent. Lui aussi doit traduire en fait les convictions profondes que lui dicte sa conscience.

« Celui qui fait la vérité vient à la lumière. »

Vivre dans la vérité nous fait déboucher sur la lumière, « accueillir » le Christ. Jésus l’a promis : « Celui qui m’aime… je me manifesterai à lui » . Lui est la « vraie lumière » .
Mais faire la vérité constitue aussi un témoignage social. Jésus l’a dit, en nous invitant à faire resplendir notre lumière « aux yeux des hommes, pour qu’en voyant nos bonnes actions ils rendent gloire à notre Père qui est aux cieux » .
La cohérence de la vie est le plus éloquent des discours. Les enfants la demandent à leurs parents : ils les veulent unis, occupés à établir l’harmonie familiale. Les citoyens attendent cette même cohérence de la part de leurs élus : la fidélité à leur programme, le souci du bien commun et l’honnêteté dans leur gestion. Les étudiants désirent que leurs enseignants soient cohérents dans leur travail didactique et éducatif. Probité, transparence, compétence sont exigées des commerçants, des ouvriers, de tout travailleur…
La société se construit aussi par la correspondance entre nos idéaux et nos choix concrets quotidiens.

« Celui qui fait la vérité vient à la lumière. »

C’est l’expérience d’hommes comme Nelson Mandela qui, pour être fidèle à son engagement pour l’égalité, a fait de longues années de prison, avant de revenir sur le devant de la scène pour diriger son Pays ; ou comme Martin Luther King, qui a payé de sa vie sa cohérence.
C’est encore l’expérience de nombreux hommes et femmes inconnus, sans être pour autant moins authentiques dans leurs choix. Ainsi ce chef d’entreprise, dont un gros client exige des pots-de-vin en échange d’une commande de nouvelles fournitures. Conscient qu’il risque de perdre une grande partie de son chiffre d’affaires, il ne renie pas ses principes. Sa décision est douloureuse mais ferme. Le grand magasin qui distribue ses produits retire, comme prévu, ses commandes, mettant ainsi son fournisseur au bord de la faillite. Mais quelques mois plus tard, cette grande surface est obligée de faire machine arrière devant les protestations de ses clients. En effet ceux-ci ne trouvent plus dans les rayons les produits auxquels ils sont attachés. La cohérence de vie a ainsi été reconnue.

Chiara LUBICH

La Parole de Vie du mois de mars est extraite des lectures du dimanche 26 mars 2005.

Commentaire de Chiara Lubich

Cette journée de sabbat qui venait de s‘écouler à Capharnaüm avait été particulièrement chargée pour Jésus. Il avait parlé dans la synagogue, laissant tout le monde frappé par son enseignement. Il avait libéré un homme possédé par un esprit impur. En sortant de la synagogue il s’était rendu à la maison de Simon et d’André, où il avait guéri la belle-mère de Simon. La nuit venue, on lui avait amené tous les malades et les possédés : il avait guéri des infirmes de maux de toutes sortes et chassé de nombreux démons.
Après une journée et une nuit aussi intense, au matin, tandis qu’il faisait encore noir, Jésus se leva, sortit de la maison, et

«… il s’en alla dans un lieu désert ; là il priait. »

Il avait la nostalgie du Ciel. C’est de là qu’il était venu, pour nous révéler l’amour de Dieu, pour partager notre vie en tout et nous ouvrir le chemin du ciel. Il avait parcouru les routes de Palestine pour enseigner les foules, guérir le peuple de ses maladies et de ses infirmités, former ses disciples.
Mais la sève vitale qui, comme l’eau d’une source, jaillissait de son sein, lui venait d’un rapport constant avec son Père. Lui et son Père se connaissent, s’aiment, Jésus est dans le Père et le Père est en lui, ils ne font qu’un.
Le Père est l’« Abba », ce qui veut dire le papa, celui vers qui on peut se tourner avec une confiance sans bornes et un amour infini.

«… il s’en alla dans un lieu désert ; là il priait. »

Cependant, comme il était venu sur terre par amour pour nous, il a désiré que nous soyons nous aussi dans cette situation privilégiée de prière. En mourant pour nous, afin de nous délivrer, il nous a faits enfants de Dieu, ses frères. Et il nous a donné, à nous aussi, la possibilité de faire nôtre son invocation divine : « Abba, Père ! » avec tout ce qu’elle comporte d’abandon à son amour, de consolations divines, de force et d’ardeur qui naissent au cœur de ceux qui se savent aimés…
Une fois entrés dans la « chambre intérieure » de notre âme, nous pouvons lui parler, l’adorer, lui dire notre amour, le remercier, lui demander pardon, lui confier nos besoins et ceux de l’humanité entière, et pourquoi pas nos rêves et nos désirs… Quand on sait qu’une personne nous aime immensément et qu’elle est toute puissante, ne peut-on pas tout lui dire ?
Nous pouvons parler avec la Parole de Dieu, avec Jésus. Nous pouvons surtout l’écouter, le laisser nous répéter ses paroles : « Confiance, c’est moi, n’ayez pas peur ! », « Je suis avec vous tous les jours » ; et ses invitations : « Viens et suis-moi », « Pardonne soixante-dix fois sept fois », « Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le aussi pour eux ».
Nous pouvons prolonger ces instants, ou les renouveler fréquemment tout au long de la journée, presque comme un rapide regard d’amour, en disant : « Tu es, Seigneur, mon unique bien », « C’est pour toi que je fais cette action ».
Nous passer de la prière serait comme vouloir vivre sans respirer. La prière est la respiration de l’âme, l’expression de notre amour pour Dieu.
Nous sortirons raffermis de ce dialogue, de ce rapport de communion et d’amour, prêts à affronter la vie de chaque jour avec une intensité et une confiance nouvelles. Nous trouverons aussi un contact plus vrai avec les autres et avec les événements.

«… il s’en alla dans un lieu désert ; là il priait. »

Si nous ne fermons pas notre âme à toutes les sollicitations de l’extérieur, si nous ne nous recueillons pas, tu ne peux, Seigneur, venir à notre rencontre et t’entretenir avec nous comme ton amour le désire.
Mais une fois détachés de tout, nous ne voudrions plus revenir en arrière, tant l’union avec toi est douce et tout le reste caduc.
Ceux qui t’aiment avec sincérité te trouvent souvent, Seigneur, dans le silence de leur chambre, au plus profond de leur cœur. Cela les émeut comme s’ils étaient chaque fois touchés au vif.
Et ils te remercient de leur être si proche, d’être Tout, celui qui donne un sens à leur vie et à leur mort.
Ils te remercient, mais souvent ils ne savent ni le faire ni le dire. Ils savent seulement que tu les aimes, qu’ils t’aiment, et qu’il n’existe rien sur terre d’aussi doux, rien qui ne soit comparable, même de loin, à cela. Ce qu’ils éprouvent dans leur âme, quand tu te présentes, est paradis et « si le ciel est ainsi, disent-ils, oh, quelle merveille ! »
Ils te remercient, Seigneur, de leur avoir donné toute la vie, de les avoir menés jusque-là. Et s’il reste encore à l’extérieur des ombres qui pourraient obscurcir leur paradis anticipé, quand tu te manifestes, tout cela s’éloigne et n’est plus.
C’est Toi qui es.
Voilà la réalité.